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Jour 21 - La spiritualité et la transformation de la vie

Dec 21, 2025
La petite vidéo introductive figurant ici vous présente le contenu de la fenêtre du jour. Les vidéos d'approfondissement figurent quant à elles dans les programmes accessibles à l'aide du lien suivant : cliquer ici.

 

La spiritualité en-deçà des croyances

Andrew Newberg, pionnier de la neurothéologie, définit la spiritualité comme « l'expérience subjective de connexion avec quelque chose de plus grand que soi », une expérience qui change progressivement notre relation à nous-même, aux autres et au monde. Cette définition s'intéresse à la dimension expérientielle – ce qui est vécu intérieurement – indépendamment du cadre (religieux, philosophique, contemplatif) dans lequel elle émerge. Elle parle ainsi à tous – croyants, agnostiques, athées.

La spiritualité ne concerne pas ce que vous croyez – mais comment vous vous reliez au mystère de l'existence.

Les neurosciences contemplatives révèlent quelque chose de fascinant : peu importe que vos expériences spirituelles émergent de la prière, de la méditation, de la contemplation de la nature, de l'art, ou de moments de grâce spontanée – elles partagent toutes des signatures neurologiques communes. Votre cerveau active le cortex préfrontal médian (conscience élargie), apaise le cortex pariétal postérieur élargissement des frontières du soi), et augmente la cohérence entre différentes régions cérébrales.

Avec Mark Waldman, nous insistons sur un point crucial : la spiritualité n'est pas une évasion de la vie réelle, c'est une transformation de la manière dont vous habitez cette vie. Elle ne vous retire pas du monde – elle vous y ancre plus profondément, avec plus de présence, de compassion, de lucidité et de sens.

Le voyage de transformation - selon les neurosciences !

La spiritualité n’a rien à voir avec un état permanent de béatitude. C'est un parcours avec des hauts et des bas, des moments de grâce et des moments de frustration. Mais c'est un voyage qui transforme littéralement notre cerveau – et notre vie.

Voici ce que les personnes engagées sur ce chemin traversent couramment, avec ce qui se passe dans leur cerveau à chaque étape - selon la recherche en neurosciences !

Étape 1 : Le réveil inconfortable

Ce que nous ressentons :
Agitation, insatisfaction, frustration. Nous commençons à remarquer l'incessant bavardage mental, la réactivité émotionnelle, le sentiment d'être piégés dans nos propres schémas. C'est comme si nous étions pris entre notre ancienne façon de vivre et quelque chose de nouveau que nous percevons mais qui reste hors de portée.

Ce qui se passe dans notre cerveau :
Nous développons ce qu'on appelle la « méta-conscience » – la capacité d'observer nos processus mentaux plutôt que d'être emportés par eux. C'est déstabilisant, mais c'est le début du changement.

Pourquoi c'est important :
Nous ne pouvons pas transformer ce que nous ne voyons pas. Cette prise de conscience, aussi inconfortable soit-elle, est notre point de départ.

Étape 2 : L'apprentissage chaotique

Ce que nous ressentons :
Quand nous commençons à pratiquer (méditation, contemplation, pleine conscience), notre esprit vagabonde constamment. Nous nous jugeons : "Je suis nul à ça. Ça ne marche pas pour moi." Mais parfois, juste parfois, nous attrapons de brefs moments de clarté – comme remonter à la surface pour respirer.

Ce qui se passe dans notre cerveau :
Chaque fois que nous remarquons que notre esprit vagabonde et que nous ramenons notre attention, nous construisons littéralement de nouvelles voies neuronales. Le réseau du mode par défaut (DMN) – celui qui rumine et construit des histoires – commence doucement à s'apaiser.

Pourquoi c'est important :
La frustration que nous ressentons est en fait la preuve que nous travaillons. Nous recâblons notre cerveau, un retour d'attention à la fois.

Étape 3 : L'adoucissement

Ce que nous ressentons :
Un jour, nous remarquons quelque chose d'étrange : les histoires que nous nous racontons habituellement ("Je ne suis pas assez bon", "Personne ne me comprend", "Je dois tout contrôler") semblent moins solides, moins vraies. Il y a de l'espace entre nous et nos pensées. Les problèmes semblent moins personnels. Le jugement sévère que nous portions sur nous-mêmes apparaît maintenant comme une simple pensée passagère.

Ce qui se passe dans notre cerveau :
Notre DMN montre une activité réduite. Le récit du « moi » se relâche. Notre cerveau commence à comprendre qu'il y a plus en nous que nos pensées et nos émotions – il y a celui qui les observe.

Pourquoi c'est important :
Cet espace est notre liberté. C'est l'espace où nous pouvons choisir notre réponse plutôt que de réagir automatiquement.

Étape 4 : Moments d'unité

Ce que nous ressentons :
Sans prévenir, cela arrive. Un moment où les frontières entre nous et le monde se dissolvent. Nous regardons le ciel, ou nous sommes assis en méditation, ou nous tenons la main de quelqu'un – et soudain, il n'y a plus de séparation. Juste l'unité, une paix profonde, un amour inconditionnel. Un sentiment de retour à la maison que nous n'avions jamais vraiment quitté.

Ces moments peuvent durer quelques secondes ou quelques minutes. Mais ils changent tout. Ils deviennent des repères permanents qui modifient notre compréhension de la réalité.

Ce qui se passe dans notre cerveau :
Le cortex pariétal postérieur – celui qui maintient les frontières du "moi" séparé – s'apaise temporairement. Le cortex préfrontal médian s'active intensément. Notre cerveau fait l'expérience directe de quelque chose qu'aucun concept ne peut capturer : l'interconnexion de toute chose.

Pourquoi c'est important :
Ces expériences ne sont pas des hallucinations ou des fantasmes. Ce sont des aperçus directs d'une réalité plus profonde que notre perception habituelle fragmentée. Une fois que nous les avons vécues, nous ne voyons plus le monde de la même façon.

Étape 5 : L'intégration – quand les états deviennent des traits de personnalité

Ce que nous ressentons :
Les défis ne disparaissent pas. Nous continuons à vivre des moments difficiles, des déceptions, des peurs. Mais quelque chose a fondamentalement changé dans la façon dont nous les affrontons.

L'anxiété passe plus rapidement. Nous trouvons naturellement de la patience où nous n'en avions pas. La compassion pour nous-mêmes et les autres n'est plus un effort – c'est devenu notre réponse par défaut. Il y a un bien-être de base, une paix intérieure qui ne dépend plus des circonstances extérieures.

Ce qui se passe dans notre cerveau :
Ce ne sont plus des états temporaires – ce sont devenus des traits de caractère durables. Notre cerveau a subi une réorganisation structurelle. Les personnes qui pratiquent depuis longtemps montrent une plus grande intégration entre plusieurs réseaux cérébraux. L'amygdale (centre de la peur) devient moins réactive. Le cortex préfrontal (régulation et perspective) s'épaissit.

Pourquoi c'est important :
Nous ne sommes plus les mêmes personnes qu'au début de ce voyage. Nous avons littéralement reconfiguré notre cerveau pour incarner plus de présence, de compassion et de sens. Ce n'est pas magique – c'est neuro-évolutif.

Exercice expérientiel

Pour honorer cette dynamique évolutive qui nous encourage, nous porte et nous conduit vers une version plus libre, plus construite, plus avisée et plus bienveillante de nous-même, je vous invite à vivre cette expérience :

Écrivez deux lettres :

  1. Une lettre de votre moi d'il y a cinq ou dix ans à votre moi actuel
    Que dirait cette version passée de vous si elle pouvait voir qui vous êtes devenu ? Qu'est-ce qui la surprendrait ? Qu'est-ce qui la rassurerait ? Quelles peurs aviez-vous alors qui se sont révélées infondées ? Quelles forces avez-vous développées que vous n'auriez jamais imaginées ?
  2. Une lettre de votre moi actuel à votre moi futur (dans cinq ou dix ans)
    Que voulez-vous dire à celui ou celle que vous deviendrez ? Quelles sagesses aimeriez-vous voir se développer ? Quelles qualités espérez-vous avoir cultivées ? Comment imaginez-vous avoir évolué dans votre capacité à aimer, à être présent, à servir ?

Remarquez l'évolution. Honorez le parcours.

Ce simple exercice révèle souvent quelque chose de profond : nous avons déjà parcouru un chemin de transformation plus grand que nous ne le réalisons habituellement. Et le chemin qui s'ouvre devant vous est plein de possibilités que nous ne pouvons même pas encore imaginer.

 

 

Références

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